Décryptage : le droit d’alerte du CSE

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Le droit d’alerte, prérogative clé du Comité social et économique (CSE), permet aux élus d’intervenir face à des situations préoccupantes susceptibles d’affecter l’entreprise ou les salariés. Il se décline en cinq catégories. Quotidien du CSE vous en dit plus sur ce moyen destiné à signaler des dysfonctionnements et à engager un dialogue avec l’employeur pour y remédier.

Qu’est-ce que le droit d’alerte du CSE ?

Le droit d’alerte CSE permet aux représentants du personnel de signaler une situation anormale ou préoccupante dans l’entreprise. Il vise à protéger les salariés et à prévenir les impacts négatifs sur leur santé, leurs droits ou la situation économique de l’entreprise.

Les différents types de droit d’alerte

Le CSE peut exercer son droit d’alerte dans cinq catégories de situations :

  • Atteinte aux droits des personnes : en cas de harcèlement moral ou autre, discrimination ou violation des droits fondamentaux des salariés.
  • Danger grave et imminent : lorsqu’une situation met en péril la santé ou la sécurité des travailleurs.
  • Risque grave pour la santé publique et l’environnement : en cas de menace environnementale ou sanitaire.
  • Situation économique préoccupante (entreprises de plus de 50 salariés) : lorsque la santé financière de l’entreprise est en danger.
  • Recours abusif aux contrats précaires (entreprises de plus de 50 salariés) : pour dénoncer un usage excessif des CDD ou de l’intérim.

Comment exercer un droit d’alerte ?

L’exercice du droit d’alerte CSE suit une procédure spécifique, qui varie selon le type d’alerte déclenchée. Les voici dans les grandes lignes :

L’alerte en cas d’atteinte aux droits des personnes

Motifs : harcèlement (moral ou sexuel), discrimination, atteinte à la vie privée, non-respect des droits des salariés (congés, droit de grève, droit à la déconnexion, etc.).

Lorsqu’un membre du CSE constate une atteinte aux droits des personnes, il doit en informer sans délai l’employeur. Une enquête conjointe est ensuite menée pour évaluer la situation et proposer des solutions. En l’absence d’accord ou de mesures adaptées, le CSE peut saisir le Conseil de prud’hommes, avec l’accord du salarié concerné.

L’alerte en cas de danger grave et imminent

Motifs : risque immédiat pour la santé ou la sécurité des salariés (matériel défectueux, exposition à des substances toxiques, absence de protections adaptées…).

Le Comité doit signaler sans délai la situation à l’employeur, en l’inscrivant dans le registre des dangers graves et imminents, avec les détails des postes concernés, la nature du risque et les salariés exposés. Une enquête conjointe est menée pour évaluer le danger.

En cas de désaccord sur la gravité ou les mesures à prendre, une réunion du CSE est organisée sous 24 heures, avec information de l’inspection du travail et de la CARSAT. Si aucun accord n’est trouvé, l’inspection du travail est saisie immédiatement.

L’alerte en cas de risque grave pour la santé publique et l’environnement

Motifs : pollution, traitement inadapté des déchets, usage de substances dangereuses…

Le CSE alerte immédiatement l’employeur, qui doit examiner la situation avec lui. L’alerte est inscrite dans un registre spécial. Si l’employeur n’entreprend aucune action dans un délai d’un mois, le CSE peut saisir le préfet du département pour qu’il prenne les mesures nécessaires.

L’alerte économique (uniquement pour les entreprises de plus de 50 salariés)

Motifs : baisse du chiffre d’affaires, perte de clients majeurs, retards de paiement des salaires, restructuration inquiétante, etc.

Le Comité social et économique demande des explications à l’employeur, qui doivent être inscrites à l’ordre du jour de la prochaine réunion. Si les explications fournies sont insuffisantes, le CSE établit un rapport, qu’il transmet à l’employeur ainsi qu’au commissaire aux comptes. Le CSE peut alors saisir le conseil d’administration ou informer les actionnaires de la situation préoccupante.

L’alerte sociale (uniquement pour les entreprises de plus de 50 salariés)

Motifs : recours excessif aux CDD, intérim ou autres contrats précaires.

Le Comité social demande des explications à l’employeur concernant l’abus constaté, tel qu’un recours excessif aux contrats précaires. Si l’abus est confirmé, l’inspection du travail peut être saisie. L’employeur, en réponse, doit proposer des mesures correctives pour remédier à la situation.

Quelles sont les obligations de l’employeur après une alerte ?

Dès lors que le CSE émet une alerte, l’employeur est dans l’obligation d’examiner la situation soulevée en collaboration avec l’instance représentative. Qu’il s’agisse d’un danger imminent, d’une atteinte aux droits des personnes, ou d’un risque économique ou social, l’employeur doit analyser la nature du problème pour déterminer sa gravité et les actions à entreprendre.

Une enquête et des mesures correctives

L’employeur doit réaliser une enquête conjointe avec le CSE pour analyser la situation. Sur la base des conclusions, il doit appliquer des mesures correctives adaptées. En cas de danger grave et imminent, il est tenu d’agir rapidement pour assurer la sécurité et la santé des salariés. Les mesures doivent être proportionnées et permettre de résoudre le problème efficacement et sans délai.

Une prise de décision sans perdre de temps

Devant un danger grave et imminent, l’employeur doit intervenir immédiatement pour protéger la santé et la sécurité des salariés. En cas de non-action dans un délai raisonnable, le CSE peut en informer l’inspection du travail. Tout cela pour dire que la réactivité de l’employeur est primordiale pour éviter des risques majeurs pour les employés et l’entreprise.

La consignation des alertes

L’employeur doit consigner les alertes dans les registres prévus à cet effet, par exemple, le registre des dangers graves et imminents. L’idée est de garantir une traçabilité des actions entreprises et de montrer que la situation a été prise en charge sérieusement. Il est primordial d’avoir une documentation claire et précise pour démontrer l’engagement de l’employeur à résoudre le problème.

Rapports et transparence

En cas d’alerte économique, l’employeur a l’obligation de fournir des explications détaillées sur la situation et ses causes. Si ces dernières sont jugées insuffisantes, le CSE peut transmettre un rapport aux commissaires aux comptes, au conseil d’administration ou aux actionnaires. L’employeur doit également être transparent sur les mesures prises pour rétablir la situation.

Des réponses concrètes aux abus

Si un abus est constaté, comme un recours excessif aux contrats précaires, l’employeur doit proposer des mesures correctives. L’objectif est de réduire ces pratiques, d’améliorer les conditions de travail des salariés, afin qu’elles deviennent équilibrées et conformes aux normes légales.

Quelle protection pour les élus CSE lors de l’exercice du droit d’alerte ?

Les élus du CSE sont protégés contre les sanctions ou mesures discriminatoires lorsqu’ils exercent leur droit d’alerte de bonne foi. Mais attention, une alerte abusive ou malveillante peut entraîner des sanctions, comme des amendes ou des peines de prison. La loi du 21 mars 2022 renforce cette protection contre les représailles et permet aux élus de se faire assister par des experts, les frais étant partiellement supportés par l’employeur.

Quelques exemples concrets et jurisprudence

Ces exemples montrent comment le droit d’alerte peut s’appliquer à des situations variées, notamment en matière de respect des droits des salariés, de risques graves pour la santé, de problèmes économiques ou de recours abusif à des contrats précaires.

Atteinte aux droits des personnes – Cass. soc. 17 juin 2009, n°08-40274

Les délégués du personnel (DP) ont saisi le tribunal pour violation des libertés individuelles après que des lettres anonymes ont révélé que l’employeur surveillait les ordinateurs des salariés sans leur accord. Le droit d’alerte a été reconnu, notamment concernant l’accès aux messageries électroniques.

Danger grave et imminent pour la santé publique ou l’environnement – Cass. soc. 20 mars 1996, n°93-40111

Un représentant du personnel a signalé un risque grave pour la santé publique lié à l’utilisation d’une machine dangereuse sur le lieu de travail. La Cour de cassation a confirmé la validité de l’alerte en raison du danger avéré pour la santé des travailleurs.

Droit d’alerte économique – Cass. soc. 18 janvier 2011, n°10-30126

Le CSE a activé son droit d’alerte économique après avoir identifié des faits pouvant menacer la situation financière de l’entreprise, malgré l’absence de difficultés immédiates. Cette alerte concernait une réorganisation mondiale de l’entreprise, jugée suffisamment préoccupante pour justifier la démarche.

Le droit d’alerte CSE est un outil fondamental pour garantir un environnement de travail sûr et sain. Avec une bonne gestion de ce droit, l’employeur, conjointement avec le représentant du personnel, peut prévenir les risques, optimiser la sécurité des salariés, maintenir la transparence et l’équilibre dans l’entreprise.

 

Sources de cet article :

En quoi consiste le droit d’alerte du comité social et économique (CSE) ?service-public.fr

Les 5 droits d’alerte du CSEsolutions-cse.org

Droit d’alerte : comment le faire valoir ?legalstart.fr

Droit d’alerte cse : exemples, procédure et code du travailcse-guide.fr